Doua Arafat : signification et puissance spirituelle du 9 Dhou al-Hijja

Doua Arafat : signification et puissance spirituelle du 9 Dhou al-Hijja

par Salima Bachar

Doua Arafat : cette prière qui fait trembler le silence

Il y a des jours où le monde semble s’arrêter. Pas de bruit. Pas de geste inutile. Juste des souffles retenus. Et des milliers d’âmes tournées vers le même ciel. Ce jour, c’est le 9 Dhou al-Hijja. On l’appelle le jour d’Arafat. Il ne ressemble à rien d’autre. Ni fête. Ni rituel bruyant. Juste une présence, verticale, fragile, puissante.

Dans ce désert nu, aux portes de La Mecque, les pèlerins s’installent. Il n’y a pas de décors. Pas de spectacle. Mais ce lieu déploie une force que rien n’explique. Parce que ce jour-là, on ne vient pas pour faire. On vient pour dire. Ou même… pour ressentir.

(Et si vous vous demandez comment vivre cette journée simplement, il y a ce texte tout doux sur les rituels du jour d’Arafat qui vous guidera sans bruit.)

Arafat, c’est un cœur à découvert

On ne bouge presque pas à Arafat. On reste là, debout, assis, les mains levées. Mais à l’intérieur, c’est un fleuve. Une mémoire en mouvement. Il y a ceux qui parlent tout haut, ceux qui murmurent, ceux qui restent silencieux. Et tous ont les yeux tournés vers l’invisible.

Ce n’est pas un moment d’obligation mécanique. C’est un instant suspendu, où tout semble possible. Les cœurs fatigués, les espoirs fragiles, les pardons qu’on n’a jamais osé demander… tout trouve sa place. On n’est pas là pour bien réciter. On est là pour oser être vrai.

Mais au fond, qu’est-ce que la Doua d’Arafat ?

Le mot "doua", on le traduit souvent par "prière". Mais ici, c’est bien plus fin. C’est une parole douce, dirigée vers le ciel, sans masque, sans formule parfaite. Une confidence sacrée. Le jour d’Arafat, cette prière devient centrale. Elle ouvre un passage. Entre l’humain, vulnérable, et la lumière divine.

Elle se fait l’après-midi. Elle dure des heures. Mais parfois, quelques minutes suffisent. Il n’y a pas de format imposé. Certains reprennent les invocations du Prophète ﷺ. D’autres parlent avec leurs mots. Et tous déposent un morceau de leur vie.

Ce qu’on dit ce jour-là… on ne le dit pas ailleurs

Il y a, dans cette prière, une densité rare. On y met des rêves oubliés, des blessures anciennes. Des « pourquoi » sans réponse. Des silences trop longs. Et tout cela, on le remet doucement entre les mains du Très-Haut.

Certains demandent la paix. D’autres, l’amour. Il y a ceux qui espèrent un enfant, ceux qui demandent pardon à une mère qu’ils ne verront plus. Chaque prière est un monde. Et sur cette colline sans ombre, ces mondes se parlent sans se ressembler. Certains suivent les mots du Prophète ﷺ, d’autres ceux d’Imam Husayn. Mais tous offrent leur vérité, comme on tend une fleur fragile au vent.

Une prière qui ne s’arrête pas à La Mecque

Et le plus beau ? C’est qu’on n’a pas besoin d’être là-bas pour la faire. Le jour d’Arafat, partout dans le monde, des cœurs s’ouvrent. Certains jeûnent. D’autres posent leur téléphone, ferment les volets, et restent seuls un instant. Juste pour parler à Dieu.

(Et parfois, on ressent ce besoin d’envoyer un mot simple à ceux qu’on aime. Dans ce cas, ces 30 SMS à partager pour Arafat tombent à pic. De la tendresse en quelques lignes.)

On peut être dans un appartement parisien, un train bondé, un jardin en silence. La doua d’Arafat, c’est un lien qu’on noue où qu’on soit. Pas besoin d’un tapis brodé. Ni d’une voix parfaite. Juste l’intention. Et un moment de calme.

Et peu importe les mots. Que l’on suive une tradition précise ou que l’on cherche juste à se dire… ce jour-là, le cœur a ses propres phrases, et Dieu les comprend toutes.

Quelques mots qui résonnent depuis des siècles

Il y a une invocation que beaucoup récitent ce jour-là. Elle traverse les générations comme un fil de lumière :

« La ilaha illa Allah, wahdahu la sharika lah, lahul mulk wa lahul hamd, wa huwa ‘ala kulli shay’in qadir. »

Traduction simple : Il n’y a de divinité que Dieu, Seul, sans associé. À Lui la royauté, à Lui la louange. Il est capable de toute chose.

On peut la dire mille fois. Ou une seule. Peu importe. Ce qui compte, c’est la sincérité du souffle qui la porte.

Un rendez-vous rare avec soi-même

À Arafat, on parle à Dieu. Mais on se parle aussi à soi. Et parfois, pour la première fois. On regarde en face ce qu’on a mis de côté. Les regrets. Les envies timides. Les erreurs qu’on n’ose pas nommer.

C’est un moment d’humilité. Mais pas un fardeau. Plutôt une lumière douce, qui vient effleurer ce qui attendait dans l’ombre. Certains diront que c’est une renaissance. D’autres diront que c’est un apaisement. Dans tous les cas, quelque chose change.

Et après ?

On ne sort pas d’Arafat comme on y est entré. Même à distance. Il reste un silence particulier. Un peu comme après un orage d’été. L’air est plus clair. Le cœur plus léger. Et on se dit, parfois à mi-voix : « Cette prière… elle m’a fait du bien. »

Elle n’a peut-être pas tout réglé. Mais elle a remis un peu d’ordre. De douceur. De sens.

Et c’est déjà immense.

FAQ

❓Quelle est l’origine du Du'a Arafa ?

Le Du'a Arafa (دعای عرفه) est une invocation bouleversante, attribuée à l’imam Husayn ibn Ali, petit-fils du Prophète ﷺ. Il aurait prononcé ces mots à Arafat, avant le coucher du soleil. Ce texte appartient au trésor spirituel chiite, mais sa beauté poétique a touché bien des âmes, même en dehors de cette tradition.

❓Cette prière est-elle reconnue dans toutes les traditions ?

Oui, sous des formes très différentes. Dans le sunnisme, on privilégie les invocations libres, souvent inspirées des paroles du Prophète ﷺ. La doua du jour d’Arafat y est un moment intense, sans texte figé. Côté chiite, le Du'a Arafa d’Imam Husayn est lu dans toute sa longueur, comme un poème sacré. Deux élans… une même soif d’absolu.

❓Qui a transmis cette prière ?

Elle a été transmise par Sayyed Ibn Tawus, Abbas Qomi, Kaf’ami, et d'autres grands lettrés chiites. Certains manuscrits anciens, comme al-Balad al-Amin, présentent une version presque complète du texte. D’éminents penseurs comme Mulla Sadra ou Fayz Kashani ont souligné sa portée mystique.

❓Y a-t-il un débat autour de son authenticité ?

Oui, surtout sur les dernières pages du texte. Certains chercheurs comme Allama Majlesi pensent que la fin du Du'a pourrait avoir été ajoutée par des maîtres soufis, car le style change brusquement. Malgré ces nuances, toute la prière est récitée intégralement, car elle reste fidèle à l’esprit de spiritualité chiite.

❓Que contient réellement cette prière ?

Ce n’est pas qu’une prière. C’est un récit intérieur. Une traversée de l’âme. Chaque mot vibre comme une corde de oud. Louanges à la création. Frissons face au mystère. Aveux doux-amers. Et des demandes murmurées avec des mains pleines de faille. C’est une lettre mystique, entre métaphysique et tendresse.

❓Comment récite-t-on le Du'a Arafa ?

La récitation a lieu le 9 Dhou al-Hijja, de la prière de Zuhr jusqu’au coucher du soleil, dans le désert d’Arafat pendant le Hajj. Mais beaucoup le récitent aussi chez eux, ou dans des mosquées, avec recueillement et lenteur, souvent en persan ou en arabe, parfois accompagné d’une traduction pour savourer chaque mot.

❓Pourquoi ce Du'a touche-t-il autant de personnes ?

Parce qu’il est profondément humain. Il n’est pas figé. Il parle du doute, du besoin d’être guidé, du vertige face à la mort. Il prend le temps de nommer les étapes de la vie, du ventre maternel jusqu’à l’ultime souffle. Et malgré tout cela, il rayonne de gratitude. Comme une main levée vers un ciel silencieux… qui écoute.

📌 Note douce : le Du’a Arafa d’Imam Husayn n’est pas récité dans toutes les écoles musulmanes, mais il est souvent lu comme un texte méditatif, apprécié pour sa richesse intérieure et sa beauté littéraire.

À propos de Salima Bachar

Salima Bachar est autrice pour La Maison des Sultans. Elle écrit avec la mémoire du sable, la douceur des rituels anciens et la richesse des secrets glissés entre les fêtes lumineuses et les rêves qui veillent. Beauté, bien-être, maison, voyages… Ses textes célèbrent les gestes discrets, les traditions vivantes et les symboles qui traversent le temps. Entre matières naturelles et récits sensibles, sa plume relie l’intime à l’universel, avec une voix sensorielle et profonde.

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Salima répond toujours : contact@lamaisondessultans.com

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