
Oser voyager seul au Maghreb : entre intuition et confiance
par Salima Bachar
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Il y a des voyages qu’on fait à deux. Ou à quatre. Avec des valises qui traînent et des fous rires dans les halls d’aéroport. Et puis, il y a ceux qu’on fait seul, par choix ou par nécessité. Ceux où l’on se parle à soi-même dans le taxi. Où l’on se réinvente entre un thé à la menthe et un appel manqué. Et dans le décor vibrant du Maghreb — ses médinas, ses ruelles, ses silences pleins — voyager en solo prend une autre épaisseur.
C’est où, la confiance ?
Pas dans le guide touristique. Pas dans l’itinéraire trop parfait. La vraie confiance, elle se niche ailleurs. Dans ce petit moment où l’on descend du bus sans savoir dans quelle direction aller. Dans l’odeur du cumin au détour d’un souk, ou dans ce regard d’un inconnu qui vous dit "ça va aller". Il faut s’y abandonner un peu. Sans naïveté. Mais avec lucidité.
Voyager seul, ce n’est pas être inconscient. C’est savoir que tout peut arriver, et choisir malgré tout d’y aller.
Marrakech, Casablanca, Fès : la foule et le fil intérieur
Dans les rues de Marrakech, on est rarement seul. Mais on peut s’y sentir seul, étrangement. Les voix fusent, les marchands chantent, les scooters klaxonnent. Et pourtant, au cœur de la médina, on trouve des instants suspendus : un regard croisé, un patio désert, un jus d’orange au goût de soleil. Voyager seul ici, c’est apprendre à se frayer un chemin sans bruit, à observer sans se cacher.
À Fès, c’est la mémoire qui vous accompagne. Les murs parlent. Le cuir des tanneries, les encens, les portes sculptées… tout semble vous chuchoter quelque chose. Pas besoin de parler. Il suffit de marcher, et d’écouter.
À Casablanca, l’énergie est différente. Plus brute, plus urbaine. Mais c’est aussi là qu’on expérimente la vraie autonomie. Prendre un tramway seul. Boire un café sur une terrasse. Flâner sur la Corniche. Sentir qu’on existe pleinement, sans avoir besoin de justifier sa présence.
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La peur du vide, ou le luxe de l’intuition
On vous posera la question. “Tu pars seul ?” Avec ce demi-sourire qui mélange inquiétude et admiration. Et pourtant, être seul, c’est aussi pouvoir écouter ses élans. Ne pas débattre sur ce restaurant. Ne pas faire de compromis sur l’heure du réveil. Choisir de rester sur un banc parce que l’air est bon. C’est petit, mais c’est immense.
Et puis il y a cette chose qu’on appelle intuition. Ce sixième sens affûté par le silence. On apprend à sentir si une ruelle est trop sombre. Si une invitation est trop insistante. Si un endroit nous appelle ou nous repousse. On devient plus réactif. Plus en lien avec ce qu’on ressent — vraiment.
Se sentir protégé, même sans entourage
Mais soyons honnêtes. On a beau être solide, un imprévu reste un imprévu. Une entorse dans une médina. Un sac volé dans un bus. Une fièvre qui vous cloue dans une chambre sans clim’. Et quand on est seul, on ne peut pas juste dire “tu peux m’aider ?” à un proche.
C’est là que certains choix faits avant le départ prennent tout leur sens. Une carte bancaire bien paramétrée, un contact local noté dans le téléphone, et parfois même un petit service discret mais précieux. Comme ce dont on parle dans cet article :
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Voyager seul ne veut pas dire voyager sans filet. Bien au contraire. Ceux qui partent seuls prévoient mieux. Ils savent ce que coûte un rapatriement, ce que prend un remboursement, ce que vaut une vraie assistance. Alors ils anticipent. Tranquillement.
La liberté comme seul programme
En voyage solo, il n’y a ni disputes de couple, ni enfants impatients. On peut rester trois heures devant un minaret, ou rater le musée parce qu’on a trop aimé le marché. On peut aussi s’ennuyer, c’est vrai. Avoir un coup de blues devant un couscous trop généreux. Se sentir transparent dans un café.
Mais ces moments-là comptent autant que les autres. Parce qu’ils forcent à s’ouvrir différemment, à échanger un mot, un sourire, une demande d’aide. Et souvent, la réponse est belle. Les gens viennent à vous. Pas toujours pour vendre. Parfois juste par curiosité. Ou par bienveillance.
Et après ?
On revient différent. Ce n’est pas forcément spectaculaire. Il n’y a pas de grande révélation mystique (enfin… pas toujours). Mais on sent qu’on a un peu grandi. Qu’on a appris à se faire confiance, pas juste en tant que touriste, mais en tant qu’humain.
Et on n’oublie pas. Le goût du thé pris seul. Le silence d’un riad. La voix d’un inconnu. Les murs chauds. Les senteurs, surtout. Et cette sensation étrange, mais douce : “je l’ai fait”.
À propos de Salima Bachar
Salima Bachar est autrice pour La Maison des Sultans. Elle écrit avec la mémoire du sable, la douceur des rituels anciens et la richesse des secrets glissés entre les fêtes lumineuses et les rêves qui veillent. Beauté, bien-être, maison, voyages… Ses textes célèbrent les gestes discrets, les traditions vivantes et les symboles qui traversent le temps. Entre matières naturelles et récits sensibles, sa plume relie l’intime à l’universel, avec une voix sensorielle et profonde.
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Salima répond toujours : contact@lamaisondessultans.com