
Jardins d’Orient sous serre : un parfum de là-bas dans nos arrière-cours
par Salima Bachar
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Il y a des odeurs qui vous attrapent par le col. La menthe poivrée écrasée sous les doigts. Le jasmin du soir. L’olivier qui transpire la chaleur. Des senteurs qui n’ont rien d’un souvenir flou, mais tout d’une gifle douce. Quand on pousse la porte d’une serre, et qu’on y a planté un bout d’Orient, c’est comme rouvrir une page qu’on croyait oubliée. Et franchement, ça fait quelque chose.
Recréer un petit Maroc au fond du jardin
Ça commence souvent par un pot. Un basilic sacré ou une verveine d'Orient, ramenée par une tante ou achetée sur un marché en bord de périph. Et puis, doucement, ça devient plus qu’un caprice vert. On se surprend à rêver de figuiers qui sentent le sucre, de grenadiers en fleur, de cactus qu’on croirait sortis d’un film égyptien des années 60.
Et là, on comprend : il faut une serre de jardin. Une vraie. Pas une cabane à tomates. Une bulle qui protège. Du gel, du vent, de la grisaille. Mais aussi du bruit. Parce que cultiver un coin d’Orient, c’est pas juste faire pousser. C’est recréer une atmosphère. Celle des fins d’après-midi à l’ombre du mûrier. Des discussions sans fin autour d’un thé brûlant.
Alors on installe. Des potées d’aloès, qui cicatrisent tout, sauf le mal du pays. Des citrons doux, comme ceux qu’on mange à la main en Algérie. Des rosiers de Damas, avec ce parfum gras, presque capiteux, qui vous suit dans la gorge.
Une serre comme un ventre chaud
Il y a quelque chose de maternel, presque enveloppant, dans une serre bien chauffée. On y entre comme on rentrerait dans un hammam. La buée sur les vitres. Les gouttelettes qui perlent. Et cette sensation d’être ailleurs. Vraiment ailleurs. Même si dehors, le sol est gelé.
Les plantes orientales aiment ça. Ce cocon moite, cet entre-deux. Pas vraiment l’extérieur, pas tout à fait l’intérieur non plus. Le laurier sauce, par exemple. Il devient presque arrogant. Il lève les bras. Il prend de la place. Il se sent chez lui.
Même chose pour les palmiers nains. Ces faux modestes, qui grandissent au ralenti, mais dont les racines, elles, partent à la conquête. Comme si elles cherchaient le souvenir d’un sol plus chaud.
Et puis il y a les silences
Parce que dans une serre orientale, il ne se passe pas que des choses visibles. Il y a des silences. Denses. Épais comme le miel dans le fond du verre. On s’y assied parfois sans le dire. On écoute pousser. On entend des souvenirs. Des voix. Des musiques qui ne sont pas jouées.
Une serre, ça devient vite un refuge. Un sanctuaire. Pour les plantes, oui. Mais aussi pour ce qu’on ne dit pas toujours. Ce manque d’ailleurs, ce besoin de racines, même quand on n’est pas né là-bas. Parce que le jardinage, au fond, c’est un peu ça : une tentative de faire pousser ce qui ne pousse plus en soi.
Des conseils ? Oui, mais à la louche
– Ne jamais sur-arroser les plantes du désert. Elles détestent ça.
– Protéger les jeunes oliviers les deux premiers hivers. Le mistral, ça va. Le gel, non.
– Offrir à vos plantes aromatiques un pot en terre cuite. Ça respire mieux.
– Et surtout, ne pas vouloir tout maîtriser. L’Orient, c’est aussi le lâcher-prise.
Il y a quelque chose de mystique dans ce mélange. Un jasmin syrien, un romarin tunisien, un cactus libanais. Et nous, au milieu. Comme des passeurs. Des jardiniers de la mémoire.
Foire aux questions pour cultiver son jardin d’Orient
Puis-je vraiment faire pousser des plantes orientales en France ?
Oui, mais pas n’importe comment. Certaines plantes adorent le sud. D’autres ont besoin d’une serre de jardin bien protégée. Le tout, c’est de leur offrir de la chaleur, du calme, et un bon drainage. Comme des invités de marque : si on les traite bien, elles restent.
Quelles sont les plantes orientales les plus faciles à cultiver ?
– Menthe marocaine : une battante. Elle pousse même entre deux pavés.
– Laurier sauce : rustique, fier, presque indestructible.
– Figuier : un poète gourmand, à condition qu’il ait du soleil.
– Aloès vera : calme et soignant. Un vrai sage du désert.
– Citronnier ‘beldi’ : fragile mais généreux, il faut juste le bichonner.
Comment créer une ambiance vraiment orientale ?
Ce n’est pas qu’une question de plantes. C’est un tout.
– Des pots en terre cuite qui transpirent un peu.
– Un tapis tissé pour s’asseoir, même dehors.
– Une lanterne percée, pour les soirées tièdes.
– Et surtout… du silence. Le vrai luxe.
Peut-on faire pousser un olivier en pot ?
Oui, mais attention. L’olivier est fier, il déteste l’excès d’eau. Offrez-lui un pot large, profond, un sol qui respire, et un coin bien exposé. En hiver ? On rentre le pot, ou on le couvre d’un voile. Il n’aime pas les surprises glacées.
Et l’arrosage, on en parle ?
Toujours en pensant au désert. Mieux vaut pas assez que trop. La plupart des plantes d’Orient ont horreur d’avoir les pieds dans l’eau. Le bon rythme ? On touche la terre. Si elle colle aux doigts, on attend. Si elle craque, on arrose.
Où trouver ces plantes-là ?
Pas besoin de billets pour Marrakech. De plus en plus de pépinières spécialisées en plantes méditerranéennes et orientales fleurissent en France. Sinon ? Les marchés de quartiers orientaux sont des mines d’or. Un basilic, un jasmin, un conseil précieux offert avec le sourire.
Peut-on associer plantes orientales et plantes locales ?
Bien sûr ! Et c’est même beau à voir. Une verveine orientale à côté d’un thym de Provence ? Parfait. Le mimosa en duo avec un grenadier ? Magique. Le jardin ne juge pas. Il mélange, il relie, il réinvente.
Alors voilà. Une serre, quelques pots, du terreau. Et beaucoup de cœur. Pas besoin d’aller bien loin pour ressentir l’Orient. Il suffit parfois de rêver de jardin… puis de pousser une vitre embuée, et de se laisser envelopper. Comme si le jardin chuchotait un souvenir.